Dans le monde des choses vécues et des sentiments éprouvés qui ornementent notre vitale traversée, il se chante une partition discrète, une vague sonore continue, un océan de frémissements et de clameurs, de soupirs et de souffles coupés où tout est timbre, résonance, intensité, voix, chocs, cris et vibrations. Le terrestre silence n'est qu'une vue obscure de l'esprit. Mais bien des ondes restent furtives, enveloppées dans les langes d'un bruit de fond permanent, indéfini, qui les berce. Comme les arts visuels éduquent le regard et permettent d'apercevoir les formes d'un monde, la capture du son ravive la mémoire et l'évidence d'une sensation vraie qu'il transporte en pure proximité. C'est la berceuse d'une mère, les pleurs torrentiels suivant le brutal décès, la voix d'Anita criant "Marcello ? Come here !"
Le microphone est mon filtre d'amour. Je l'oriente vers la voix, vers la métropole, vers l'animal ou la machine. Et je m'interroge sur la beauté sonore, ce primat de la vie qui ne se laisse pas facilement décrire et qui vibre entre harmonie et dissonances au service d'une expression de l'existence, fragile, vacillante, charnelle.